«Art» est un terme qu'on a du mal à saisir. Et sans rapport avec la création. Je crée pour le plaisir, et pour le plaisir du travail. Le reste concerne la critique.
Manuel Álvarez Bravo, (1902-2002, photographe mexicain)

biographie

Initié à la prise de vue et à la chambre noire à la fin des années 70, Dominique Lafleur pratique la photographie depuis plus de 35 ans. En 1987, frappé par la découverte des œuvres d’Edward Weston, et plus particulièrement celles d’Ansel Adams dont il put voir quelques originaux, il se familiarise avec leurs outils et leurs techniques. Il se consacre alors quasi exclusivement à la prise de vue avec des appareils grand format, et approfondit ses connaissances et sa pratique du système de zones. Il est également influencé par la plastique très soignée des oeuvres de Mapplethorpe, pour ne nommer que lui. Il fera alors un passage dans le domaine de la photographie professionnelle avant de bifurquer vers le domaine littéraire. Après une pause, il (re)découvre la photographie numérique, et sa matérialisation en épreuve à jets d’encre. Récemment, il a été marqué par la photographie de rue de Vivian Maier, par le style très particulier de Sebastião Salgado, et par le travail très formel de Julia Gospodarou qui a su redéfinir et adapter le système des zones du XXe siècle aux technologies numériques du XXIe siècle. Depuis plusieurs années, il se consacre également à l’étude et à l’enseignement de la littérature. Après un baccalauréat à l’Université McGill, il a fait une maîtrise en Théorie didactique de la connaissance à l’Université de Montréal. Il a également complété un doctorat en Didactique de la littérature et musique comparées. Ce parcours l’a amené à enseigner la littérature depuis une vingtaine d’années. Outre ses projets d’études supérieures et ses différents portfolios photographiques qui s'enrichissent continuellement, il a quelques projets de création interdisciplinaires. Certains mêlent photographie et littérature, alors que d'autres convoquent la musique et le littéraire. . .

démarche

L’arrivée du numérique est venue bouleverser ma conception de la photographie, maintenant qu’elle peut être faite entièrement du côté de la Chambre claire, en plein jour. Dans un premier temps, je vis l'acte photographique comme l'incarnation d'une pure spontanéité. Vouloir produire une image, c'est être à l'affût, par le regard, d'une sorte de beauté de l'immédiat, un peu à l'instar d'un praticien de l'Art brut qui pratique un art spontané et intuitif, a priori hors de toute tendance. Ainsi, la photographie partage les caractéristiques d'une théorie du fragment en acte : il s'agit d'un découpage de la réalité. Avec chaque œuvre, qu'elle soit produite à partir d'un projet délibéré (vouloir «faire un portrait», vouloir «faire un nu», etc.) ou d'un happening (au cours de promenades), des portfolios se constituent. C'est dans un deuxième temps, celui de la réflexion, quand je me demande «qu'est-ce qui va être couché sur le papier», que les référents culturels et une démarche intellectuelle interviennent. Je me considère comme un praticien habituel de la Photographie pure (mais pas uniquement). Or, en essayant constamment de transcender la condition première du snapshot (son instantanéité gratuite est fortuite), le photographique relève pour moi d'un art contemplatif du vu.

Pour moi, ce qui est ensuite re-présenté dans une «mise en scène» sur papier relève des arts visuels. Selon une approche le plus souvent simple et directe (mais aussi parfois faite de manipulations relevant des arts plastiques), fond et forme se conjuguent alors, selon les règles du photographique (c'est-à-dire la photographie et ses éléments constitutifs), afin de produire une «oeuvre» concrète. Pour moi, la photographie appartient à la grande famille des œuvres d’art sur papier comme la sérigraphie, la linographie, la lithographie, l'aquarelle, etc. En effet, le terme photo-graphie [écrire avec la lumière] prend peut-être de nos jours un sens quasi littéral puisque les tirages peuvent maintenant être réalisés avec de l’encre giclée (constituée de pigments et non de solvants) sur papier chiffon 100 % coton. Ultimement, la beauté des tirages, l'oeuvre résultante sur papier, demeure pour moi une préoccupation centrale.

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